Photo : Les attaquants français, Kylian Mbappé et Olivier Giroud, au Qatar, dimanche 4 décembre
Le meilleur buteur de l’équipe de France, Olivier Giroud, dans les bras de son jeune compatriote et coéquipier, Kylian Mbappé, eh bien, la photo suscite des commentaires homophobes. Principaux acteurs de la qualification des Bleus pour les quarts de finale, mais plutôt que de la joie, ce match face à la Pologne, remporté par les français (3-1) a inspiré des commentaires homophobes à de nombreux internautes. C’est la première image forte du mondial des Bleus. Après avoir offert un but à Olivier Giroud (celui du record de réalisations en Équipe de France), Kylian Mbappé s’est jeté dans les bras de son coéquipier. Les clichés ont fait le tour du monde, mais ce qui aurait dû rester une simple démonstration de joie et d’affection entre deux joueurs est venue s’ajouter à la longue liste des polémiques homophobes dans le football. La raison ? Les nombreux commentaires haineux et détournements que Twitter a vu fleurir depuis quelques heures.
« À partir du moment où deux mecs se serrent dans les bras, il y a tout de suite une connotation. »
Yoann Lemaire
Les réactions des internautes « démontrent que le sujet est encore très tabou et très intime dans la tête des gens. Dans le football, et le sport en général, il y a un problème avec l’homosexualité. » selon le président de l’association Foot Ensemble et militant contre l’homophobie dans le sport, Yoann Lemaire. Celui qui est le premier joueur (amateur) français à avoir publiquement fait son coming out dénonce auprès « la virilité et la masculinité toxique » qui gangrène ce sport. « À partir du moment où deux mecs se serrent dans les bras, il y a tout de suite une connotation. », continue-t-il. « Dans leur tête (celle des internautes NDRL), le foot, c’est du virilisme et de la puissance. L’homosexualité n’a pas sa place. », poursuit Yoann Lemaire.
Olivier Giroud, cible favorite
Yoann Lemaire s’en prend aussi à la « culture de l’humiliation » présente sur les réseaux sociaux. « La méchanceté et la haine de l’autre font dire n’importe quoi. L’homosexualité est ce qu’il y a de plus de bas de gamme pour eux. », affirme-t-il. Le footballeur s’attaque également au prétendu humour dont se servent ces internautes pour justifier leurs propos : « Certains pensent que c’est la liberté d’expression. On s’amuse, on s’insulte. D’ailleurs, dans leur tête, ce n’est même pas de l’homophobie puisque tout le monde en rigole. », souligne Yoann Lemaire. Olivier Giroud est particulièrement victime d’homophobie depuis plusieurs années, car « il a déjà pris position sur le sujet », en posant par exemple en Une du magazine Têtu. Surtout, un « mème » homophobe revient régulièrement sur Twitter pour célébrer les exploits du désormais meilleur buteur de l’histoire de l’Équipe de France, sous couvert d’humour : la locution « Pètes moi le c** Giroud. »
« Ce sont des propos problématiques et discriminants. »
Yoann Lemaire
Créé et popularisé par le vidéaste Mohamed Henni (connu pour casser des télévisions à chaque contre-performance de l’Olympique de Marseille), le mème était encore en tendance sur Twitter ce matin. « Ce sont des propos problématiques et discriminants. », dénonce Yoann Lemaire. « C’est facile pour humilier quelqu’un. Tu es le PD, passif, soumis et j’ai des droits sur toi. », ajoute-t-il. Le militant juge ce climat homophobe « destructeur pour les gamins qui se ressentent homosexuels. Ils ont du mal à l’assumer car ils aiment le foot. On voit des jeunes dans cette situation dans les centres de formation ». Il estime que les joueurs professionnels doivent « montrer l’exemple » à ce sujet, comme Antoine Griezmann, qui a lui aussi déjà prit position contre l’homophobie dans le football (étant par ailleurs plus épargné qu’Olivier Giroud).
« Il faut une vraie volonté de la part des joueurs pour que les choses changent et que le tabou se brise. On demande simplement de s’engager modérément et de dire ’Je suis contre l’homophobie’ »
Yoann Lemaire
Yoann Lemaire mène des actions de sensibilisation contre l’homophobie dans les centres de formation et l’assure : « Les éducateurs ont besoin de l’exemplarité des pros pour être crédible ». « Il faut une vraie volonté de la part des joueurs pour que les choses changent et que le tabou se brise. On demande simplement de s’engager modérément et de dire ’Je suis contre l’homophobie’ », demande l’ancien joueur professionnel. Mais il estime que les joueurs « ne se sentent pas concernés », comme en témoignent les récents propos de Hugo Lloris : le gardien et capitaine de l’Équipe de France avait appelé à respecter « la culture du pays » lorsqu’il a été interrogé sur le port du brassard « One Love » en faveur de l’inclusion durant le Mondial au Qatar, dans un pays où les actes homosexuels entre adultes sont illégaux.
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