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16 janvier 1977 – 16 janvier 2025 : Mathieu Kérékou a vaincu Bob Denard et l’« Opération crevette » il y a 48 ans

Photo : L’ex-président béninois, feu Mathieu Kérékou


Dimanche 16 janvier 1977, bonjour « Opération crevette » au Bénin contre le président marxiste-léniniste, Mathieu Kérékou. Jeudi 16 janvier 2025, il y a exactement 48 ans que Bob Denard a lancé cette attaque contre le régime Kérékou. Dès les premières minutes du lever du jour dominical ce 16 janvier 1977, un avion inattendu se pose sur le tarmac de l’aéroport de Cotonou. À l’horloge des mercenaires, 7h dans la capitale économique béninoise et c’est l’heure pour lancer l’ « Opération crevette » contre le président militaire béninois. Alors un groupe d’une centaine d’hommes armés jusqu’aux dents (africains et européens) bondissent du vieux appareil DC-7. Moteurs maintenus en marche et ces derniers déchargent de mystérieuses caisses. L’alerte générale est donnée dans toute la ville phare du pays au regard des premiers coups de feu ont retenti. L’échange de tir va durer trois heures entre les Forces Armées Béninoises (FAB) et les mercenaires qui finissent en déroute avec leur chef.

Porto-Novo renforcée par Séoul

Bien que le pays ait connu plusieurs coups d’État (environ une dizaine entre 1960 et 1972) au lendemain de son indépendance, le lundi 1er août 1960, l’ « Opération crevette » est une autre forme de coup d’État venir de l’extérieur et dirigé par le célèbre mercenaire français, Bob Denard, qui s’est illustré au cours de sa carrière par ses nombreux faits d’armes sur le continent africain (Angola, Comores, Cabinda, Katanga). Le blanc lance ses hommes sur les points névralgiques du pouvoir marxiste-léniniste, à savoir le camp militaire Ghézo, situé en plein Cotonou et à proximité de l’aéroport, et le Palais de La Marina, résidence présidentielle de Mathieu Kérékou, etc. Mais ne comptant pas sur le professionnalisme militaire de Porto-Novo, renforcées par les éléments du Séoul présents à Cotonou en vertu d’accords de coopération entre les républiques socialistes Bénin – Corée du Nord, l’expertise militaire de Bob Denard se trouve rapidement confrontée à de nombreuses équations de combat.

Riposte kérékiste

En effet, sur le mouvement du mercenaire français et d’une de ses escouades en direction de la ville vitrine du Bénin, ils ont essuyé les premiers affrontements sérieux sur le tarmac de l’aéroport. Signalant ainsi la riposte du timonier béninois. Tandis que ses concitoyens de Cotonou sont encore endormis, le président Mathieu Kérékou et ses partisans envoient un message via la radio : « Ainsi donc, un groupe de mercenaires à la solde de l’impérialisme international aux abois, a déclenché depuis ce matin à l’aube une agression armée contre le peuple béninois héroïque et sa révolution démocratique et populaire en attaquant la ville de Cotonou.(…) En conséquence, chaque mili­tante et militant de la Révolution béninoise où qu’il se trouve, doit se considérer et se comporter comme un sol­dat au front, engagé dans un combat sacré pour sauver la patrie en danger. »

Pas de choix, replie et direction Franceville

Un message qui a permis aux FAB de maîtriser le combat sur le terrain avec les rues de Cotonou vidées de leurs usages, lançant place aux échanges sporadiques entre les hommes de Bob Denard et la troupe de Kérékou. La stratégie de l’attaque des FAB a changé au sens de la supériorité militaire des putschistes et les pertes infligées dans leur rang. Et pour cause, très vite, l’armée béninoise qui se rêvait en « corsaire de la République » a décidé d’orienter son combat sur la porte d’entrée et de sortie aérienne du pays. L’aéroport de Cotonou est dans les jumelles des FAB affichant une situation intenable pour les soldats de Bob Denard. Au bout de quelques minutes de combat, les mercenaires n’ont pas de choix que de se replier et remonter rapidement dans leur vieux DC-7 aux hélices encore vrombissantes. D’un clin d’œil, l’appareil volant est dans le ciel en direction de Franceville, au Gabon, laissant sur le sol béninois une dizaine de mercenaires blessés.

Françafrique and co

D’après Jeune Afrique, dans la précipitation de l’évacuation, les assaillants ont laissé sur le tarmac de l’aéroport de Cotonou, des armes de fabrication française, mais surtout, une caisse censée avoir donné de précieux renseignements au régime de Kérékou. On y aurait trouvé des documents trahissant l’identité des pays pouvant avoir soutenu, si non, commandité la tentative de putsch, notamment le Gabon, inquiet de l’installation d’un régime d’idéologie marxiste-léniniste dans la région, et le Maroc d’Hassan II, n’ayant pas digéré la récente reconnaissance du Polisario par Kérékou. Mais surtout, au-dessus des éventuels soutiens africains plane l’ombre de la France et de son Service de Documentation Extérieure et de Contre-Espionnage (SDECE)… À l’intérieur, au plan national, c’est l’ancien président, Émile Derlin-Zinsou, qui est accusé par le pouvoir militaire d’avoir commandité la tentative de putsch. Un mois plus tard, soit le mercredi 16 février, Mathieu Kérékou accueille une mission d’enquête de l’ONU. Le rapport qui s’ensuivra s’avérera accablant pour le Gabon, le Maroc et le Togo, voisin de l’Ouest. Les révélations sont fracassantes : les mercenaires se seraient entraînés à Ben Guerir, au Maroc, avant d’être convoyés vers le Gabon afin de changer d’avion pour Cotonou. Une opération terrestre franco-togolaise aurait pu suivre en cas de succès…

Kérékou – Derlin-Zinsou, rivaux légendaires

Lundi 21 février 1977, c’est par une phrase laconique que le chef de l’État béninois, Mathieu Kérékou, accuse dans une interview au magazine Afrique-Asie, l’ancien président béninois Émilie Derlin Zinsou, déjà en exil, d’implication dans la rocambolesque tentative de coup d’État du dimanche 16 janvier 1977. « L’ex-président Zinsou n’est pas étranger à l’invasion mercenaire. », avait avancé Mathieu Kérékou. Le principal intéressé démentira en bloc ces accusations, en dénonçant le rôle de bouc-émissaire perpétuel que lui ferait endosser son rival légendaire. Sans succès, le jeudi 24 mai 1979, Émilie Derlin Zinsou sera condamné à mort par contumace. Mais faut-il le rappeler, que le vent de démocratisation engendré par la Conférence nationale des forces vives de la nation du février 1990, qui a soufflé sur le pays, a rapproché les deux hommes jusqu’à se réconcilier, soit 14 années plus tard. Il convient de noter que c’est un souvenir qui intervient dans un moment douloureux pour les FAB qui ont perdu 26 soldats dans une attaque terroriste le 8 janvier, à Banikoara, au Nord-ouest du Bénin.

Un commentaire

  1. GBASSI GBASSI 17 janvier 2025

    Les FAB ne seraient elles pas plus engagés hier qu’aujourd’hui ?

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