La fin du psychodrame en France ? Ce mardi 19 décembre, tard dans la soirée, l’Assemblée nationale française a adopté le projet de loi sur l’immigration issu de la Commission Mixte Paritaire (CMP), marqué par un sérieux coup de barre à droite. Une version soutenue par le Rassemblement National (RN), ce qui a considérablement désemparé le camp présidentiel. En dépit des appels lancés par la gauche, le texte a obtenu 349 voix pour, et 186 contre.
Gérald Darmanin s’est félicité d’un « texte fort », adopté « sans les voix » du RN qui méritait d’être voté pour la « protection des Français ». L’adoption de ce texte à la coloration très droitière s’est faite grâce à une majorité « très large », même en retirant le vote pour des députés RN, a-t-il ajouté. « Le texte immigration est voté définitivement. Un long combat pour mieux intégrer les étrangers et expulser ceux qui commettent des actes de délinquance. Un texte fort et ferme. Sans les voix des députés RN. », a-t-il écrit sur le réseau social X.
Le RN et la droite ont voté pour le texte, la gauche contre, chaque groupe faisant le plein de ses voix sauf le groupe communiste où il a manqué une voix. La majorité s’est en revanche divisée avec 20 voix contre et 17 abstentions chez Renaissance, 5 voix contre et 15 abstentions au MoDem, et 2 voix contre chez Horizons. Le chef de file de la France Insoumise, Jean-Luc Mélenchon, a pour sa part dénoncé une « écœurante victoire » acquise grâce aux voix de l’extrême droite. « Sans les 88 voix du RN = 261, soit moins que la majorité absolue (qui était à 265, NDLR) ! (…) Un nouvel axe politique s’est mis en place. », a-t-il réagi sur X.
Avec 349 voix pour, et 186 contre, le texte n’a théoriquement pas eu besoin des voix du RN pour passer, puisque les soutiens du texte (majorité et LR) ont réuni plus de voix sans aide lepéniste (261) que leurs opposants. Ce qui permet à Emmanuel Macron de s’éviter une nouvelle délibération. En revanche, si le RN avait voté contre, le texte aurait échoué. Ce qui, politiquement, revient à conclure que la majorité a bien eu besoin des votes de l’extrême droite, ce dont ne se prive pas la gauche.
« Pas parfait », mais « difficile »
Ce texte controversé, promis depuis dix-huit mois par le ministre français de l’Intérieur, n’est « certes pas parfait, mais c’est un texte très difficile qui a été voté sans 49-3 », l’arme constitutionnelle qui aurait permis une adoption sans vote, s’est-il félicité devant les médias à la sortie de l’hémicycle. Dans la dernière ligne droite, l’exécutif a lâché plusieurs concessions de taille aux Républicains, afin d’arracher le soutien du parti présidé par Éric Ciotti. Bonjour le changement à l’égard des étrangers. Eh bien, outre l’aide médicale d’État (la Première ministre s’est engagée à réformer l’AME dans une lettre adressée à Gérard Larcher) il est également question des aides sociales versées aux étrangers en situation régulière, comme les allocations familiales et les APL. Deux aides qui seront désormais soumises à un délai de carence de plusieurs années. Les conditions du regroupement familial ont également été durcies.
Fin du droit du sol
Toujours pour les étrangers, symbole parmi d’autres, la droite a également obtenu gain de cause sur la déchéance de nationalité pour les binationaux auteurs de crimes contre les forces de l’ordre ou sur les régularisations de travailleurs sans papiers dans les métiers en tension, qui resteraient à la discrétion des préfets. Il s’agira d’un titre de séjour d’un an, délivré au cas par cas, à condition d’avoir résidé en France pendant au moins trois ans et exercé une activité salariée durant au moins 12 mois sur les 24 derniers. Bien moins ambitieux que ce qui était initialement prévu. Sur le sujet, la Macronie n’a arraché qu’un point : la possibilité pour un travailleur sans-papiers de demander ce titre de séjour sans l’aval de son employeur. Autre marque de la droitisation du texte, la fin de l’automaticité de l’obtention de la nationalité française à la majorité pour les personnes nées en France de parents étrangers. Ce qui signe la fin du droit du sol, puisqu’il faudra désormais que l’enfant en question fasse une demande de nationalité entre ses 16 et 18 ans. Le texte prévoit aussi le rétablissement du « délit de séjour irrégulier » qui était pourtant qualifié d’inutile par le camp présidentiel.
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