Photo : Des manifestants contre les quotas se heurtent à la police à Dacca, le jeudi 18 juillet
La pire crise politique depuis 15 ans. C’est ce qu’il faut noter au Bangladesh. Depuis le début du mois de juillet, des milliers de bangladais manifestent quasi quotidiennement dans les rues de la capitale Dacca. Au départ, leur colère a éclaté après une réforme des règles de recrutement dans la fonction publique, accusée de favoriser les proches du gouvernement par les étudiants du pays. Mais avec le durcissement de la réponse de la police, qui a tiré à balles réelles, ce samedi 20 juillet, c’est désormais la fin du mandat de la Première ministre au pouvoir depuis 2009, Sheikh Hasina, que réclament les dizaines de milliers de manifestants.
La rédaction differenceinfobenin.com et celle du journal quotidien « Différence Info » du Groupe de presse « DIFFÉRENCE », font le point sur ces affrontements à l’échelle nationale entre étudiants et forces de l’ordre, qui ont fait au moins 151 morts depuis le début de la semaine.
• Coups de feu à Dacca
La mégalopole de 20 millions d’habitants était sillonnée samedi par des militaires circulant à pied ou à bord de véhicules blindés. Désertée par les bangladais le matin, des milliers de personnes y sont ensuite descendues dans les rues du quartier de Rampura et les policiers ont tiré sur elles, faisant au moins un blessé, a constaté l’AFP. « Il y a de l’anarchie dans le pays (…). Les gens se font tirer comme des lapins. », a dit l’un d’entre eux, Nazrul Islam, 52 ans. Les hôpitaux ont quant à eux signalé un nombre croissant de personnes tuées par balle depuis jeudi, les tirs des forces de l’ordre ayant été à l’origine de plus de la moitié des 151 décès enregistrés depuis le début de la semaine. La police a par ailleurs arrêté plusieurs membres du Parti Nationaliste du Bangladesh (BNP), première formation d’opposition, et de Students Against Discrimination, le principal groupe organisateur des manifestations.
• Un couvre-feu maintenu « jusqu’à ce que la situation s’améliore »
La foule protestait notamment contre le couvre-feu entré en vigueur à minuit et qui devait initialement durer jusqu’à ce jour, dimanche 21 juillet, à 10 heures (5 heures à Porto-Novo) au moins sur l’ensemble du territoire bangladais. Le ministre de l’Intérieur, Asaduzzaman Khan, a indiqué que le couvre-feu imposé samedi serait maintenu « jusqu’à ce que la situation s’améliore ». « En plus des incendies de bâtiments gouvernementaux et de postes de police par les manifestants, des incendies criminels ont rendu le réseau ferroviaire métropolitain de Dacca inexploitable. », a-t-il fait savoir pour justifier ce maintien du couvre-feu. « Ils mènent des activités destructrices visant le gouvernement », a encore affirmé Asaduzzaman Khan, accusant le BNP et le parti islamiste Jamaat d’attiser la violence.
• Une décision de justice favorable aux étudiants…
Dans une manœuvre destinée à apaiser les tensions, la justice du Bangladesh a revu à la baisse ce dimanche, mais sans l’abolir, le système de quotas, réintroduit en juin dernier, pour les candidats aux postes de la fonction publique. Selon les étudiants, cette mesure profite aux soutiens de la Première ministre Sheikh Hasina, au pouvoir depuis 2009. La Cour suprême a ainsi statué sur la réduction de ces quotas, qui réservent notamment 30% des postes aux enfants des anciens combattants de la guerre de libération du Bangladesh contre le Pakistan. Cette catégorie est réputée proche du pouvoir en place. Le procureur général A.M. Amin Uddin a précisé que 5% des emplois de la fonction publique resteraient réservés aux enfants des vétérans de la guerre d’indépendance et 2% aux autres catégories.
• …qui ne suffira pas à apaiser les tensions
Après avoir rendu sa décision, l’instance a exhorté les étudiants protestataires à « retourner en classe ». Mais après la répression croissante de ces derniers jours et l’augmentation du nombre de morts, il n’est pas certain qu’une décision favorable apaise la colère de la population. Pour preuve, le porte-parole du mouvement étudiant a déjà annoncé la poursuite des manifestations. « Il ne s’agit plus des droits des étudiants. », déclare Hasibul Sheikh, 24 ans, propriétaire d’une entreprise, sur les lieux d’une manifestation organisée samedi dans la capitale Dacca malgré le couvre-feu instauré dans tout le pays. « Notre demande porte sur un seul point, à savoir la démission du gouvernement ». De son côté, la Première ministre bangladaise devait quitter le pays aujourd’hui pour une tournée diplomatique en Espagne et au Brésil, mais elle a renoncé à son projet en raison des violences en cours.
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