L’État gabonais vient de suspendre l’application d’un décret dans le système éducatif. En fait, fin mars 2019, soit le vendredi 29 mars, le gouvernement du Gabon a annoncé en conseil des ministres une réforme restreignant l’accès aux bourses universitaires pour les futurs étudiants gabonais. C’est un décret qui disposait entre autres qu’au-delà de 19 ans, les élèves ayant eu 12/20 ou plus au baccalauréat auront le droit à une « prise en charge financière partielle » sous forme d’ »allocation ». À en croire les détails du ministre gabonais de l’Enseignement supérieur, Jean De Dieu Moukagni Iwangou, ils pourront aussi souscrire à un prêt bancaire « remboursable pendant cinq ans ». Le prêt « s’appliquera particulièrement aux filières professionnalisantes », l’État « en sera le garant » et les taux d’intérêts seront similaires à « ceux du marché ». À travers ce projet, le gouvernement gabonais, selon lui, va favoriser « l’excellence » en revenant sur les décisions de 2012 attribuant l’aide à tous les bacheliers. Cette aide s’élève aujourd’hui à 83.000 FCFA par mois en premier cycle universitaire, et 98.000 FCFA par mois en second cycle.
Une réforme rejetée
Dès leur retour de vacances, la première semaine a été très mouvementée. Sous un soleil de plomb, escortés par des policiers, des milliers de lycéens en uniforme ont répondu à l’appel de plusieurs organisations lycéennes en défilant dans les rues des principales villes du pays, tapant des mains et scandant en chœur : « Nous sommes orphelins de bourse! », « Rendez-nous nos bourses! » ou encore « On veut nos bourses! », devant le lycée Léon Mba, un des plus grands établissements de la capitale gabonaise, Libreville. « Nous sommes une centaine dans ma classe, comment voulez-vous qu’on apprenne correctement ? », s’est plaint une lycéenne. Au lycée Mabignath, situé aux Akebe, un quartier défavorisé de Libreville, une jeune fille explique qu’ »il arrive que des élèves commencent le CP1 à 9 ans… alors ça devient compliqué d’atteindre la terminale à 19 ans ». Et un de ses camarades, âgé de 20 ans de s’interroger. « Je peux comprendre pour le 12/20, mais pourquoi ajouter le critère de l’âge ? ». « Moi je passe un Bac scientifique et la majorité des gens qui passent ce Bac ont 19 ans… et ce sont les meilleurs de la classe », a-t-il renchérit.
Au troisième jour de leur protestation, les lycéens ont reçu le soutien des étudiants pour, disaient-ils, une « action collective » si le gouvernement ne revient pas sur les mesures « dans la semaine », avait indiqué le président de l’Union Nationale des Etudiants du Gabon (UNEG). Il faut quand-même rappeler qu’avant le décret, les étudiants gabonais ayant obtenu leur baccalauréat, pouvaient prétendre à une bourse universitaire d’un montant mensuel d’environ 83.000 francs CFA.
La rue a eu raison du gouvernement
« Une action collective si le gouvernement ne revient pas sur les mesures dans la semaine », avait lancé le président de l’Union Nationale des Etudiants du Gabon (UNEG). Ce message semble être reçu par le gouvernement du Gabon. « Cette mesure ne sera pas applicable cette année ». C’est par cette phrase que le ministre gabonais de l’Éducation nationale est apparu en direct au journal télévisé de 23 heures de la chaîne nationale Gabon 1ère, pour annoncer la nouvelle à la nation ce mercredi 17 avril 2019. Au grand bonheur des lycéens, la réforme sur les critères d’attribution des bourses d’études aux futurs étudiants ne sera pas appliquée cette année. À en croire le ministre de l’Éducation nationale du Gabon, Michel Menga M’Essone, « le gouvernement affirme avoir compris le message de la rue ». Par la même occasion, le gouvernement a demandé « la reprise des cours le jeudi 18 avril 2019 sur toute l’étendue du territoire national aux heures habituelles ». Par ailleurs, le gouvernement gabonais ne compte pas laisser définitivement le projet. « Un groupe de travail sur l’élaboration des modalités de mise en œuvre progressive de cette réforme » va être mis en place, a affirmé le ministre de l’Éducation nationale.
Il faut dire que l’ampleur des manifestations a été mesuré par le gouvernement au point où il avait décidé le 10 avril dernier de fermer toutes les écoles jusqu’à nouvel ordre. Cette décision est maintenant révoquée. Autre chose importante à souligner est que la réforme des bourses intervient dans un contexte où l’État gabonais, tout comme les ménages du pays, doivent se serrer la ceinture pour paraphraser le chef de l’État béninois, Patrice Talon. Le Gabon d’Ali Bongo, pays pétrolier d’Afrique centrale, est confronté à des difficultés financières depuis la chute des prix du baril il y a quatre (04) ans. C’est grâce à la perfusion du Fonds Monétaire International (FMI) qu’il essaye de respirer depuis bientôt deux (02) ans, soit juin 2017.
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