Alors que la quatrième voir la cinquième vague fait rage en Europe où la France retrousse les manches face à l’ennemi invisible cruel et meurtrier mondial, Coronavirus, le pays se retrouve encore face aux mutations du virus. En effet, le variant B.1.640 a été découvert au Congo et plusieurs cas ont été repérés en France et dans d’autres pays, mais ses caractéristiques et son origine véritable restent encore mystérieuses. « Vous avez peut-être entendu parler d’un variant congolais ». Interrogé hier, mardi 16 novembre par Ouest-France sur le risque d’apparition de nouveaux variants du Coronavirus, le ministre français de la Santé, a fait le point sur une forme du Sars-Cov2 récemment découverte en République du Congo, en Afrique centrale, et dans 3 régions de France. « Je ne dis pas ça pour inquiéter, rien n’indique que ce variant soit particulièrement dangereux, mais pour souligner que notre capacité à traquer les variants est très forte. », a tenu a rappelé Olivier Véran (même si cela n’a pas toujours été le cas). En parlant donc d’un « variant congolais », Olivier Véran voulait rappeler que la France surveille activement les mutations du Coronavirus. Mais il a aussi pointé d’autres faiblesses. Toujours est-il que ce variant a depuis une dénomination officielle, B.1.640. Il n’a pas encore hérité d’une lettre grecque, car il n’est pas considéré par l’OMS comme un « variant préoccupant ou d’intérêt ». Mais il a été récemment classé « sous surveillance » par les autorités sanitaires britanniques, européennes et notamment françaises, car les mutations présentes font craindre une diminution de l’efficacité des vaccins ou une transmissibilité importante.
En parlant donc d’un « variant congolais », Olivier Véran voulait rappeler que la France surveille activement les mutations du coronavirus. Mais il a aussi pointé d’autres faiblesses. Pour autant, l’autorité sanitaire française a raison de rappeler qu’il ne faut pas s’alarmer pour rien. « On est aujourd’hui incapable de dire si ce variant va s’éteindre ou se développer. », explique le virologue à l’Institut Pasteur, Étienne Simon-Lorière, qui a justement travaillé sur des séquences françaises. Surtout que le variant Delta semble pour l’instant écraser les autres souches. Mais ce variant B.1.640, découvert au pays que dirige Denis Sassou N’guesso, reste très surveillé dans le pays d’Emmanuel Macron. Car s’il est impossible de dire s’il peut s’imposer face à l’omniprésent Delta en France, plusieurs caractéristiques font tiquer les spécialistes. Le plus vieux génome de Coronavirus de ce variant séquencé date du 28 septembre dernier et provient de la République du Congo. Depuis, 28 variants B.1.640 ont été répertoriés dans le monde, dont 12 en France et 4 en Italie. Des cas sporadiques ont été découverts aux Pays-Bas ou encore en Espagne et aux États-Unis. Ce genre de chose arrive très régulièrement. Rappelons que le Sars-Cov2 mute, comme tous les virus, régulièrement. Souvent, ces mutations sont anodines, comme une faute de frappe. Mais parfois, si elles sont au bon endroit et avec la bonne combinaison, elles peuvent changer le comportement du virus. Comme si plusieurs fautes de frappe aléatoires changeaient le sens d’un texte.
Qu’une version avec plusieurs mutations surveillées du Coronavirus émerge, c’est donc assez courant. C’est justement en surveillant les nombreux variants qui ne sont pas dangereux que l’on s’assure de ne pas passer à côté du prochain variant Delta. Parfois, il suffit d’un coup de chance pour qu’un variant donne l’impression de se répandre dans le monde. Il suffit qu’un contaminé infecte de nombreuses personnes dans un aéroport, par exemple. Si ce variant B.1.640 est surveillé, c’est surtout qu’il a une « diversité génomique » étonnante. « Les différents génomes séquencés que l’on détecte et que l’on assigne à cette lignée ont quelques mutations divergentes. », explique la chercheuse au CNRS, spécialiste de biologie évolutive, Florence Débarre. Ces mutations sont sans gravité, mais elles sont utiles aux chercheurs pour remonter le temps. Pour faire très simple, on sait que le coronavirus mute de manière régulière, mettons tous les 7 jours. En regardant ces mutations, on peut donc faire une sorte d’arbre généalogique (ou plutôt génomique) pour suivre l’évolution de ces virus. Et le fait que ce variant B.1.640 découvert au Congo présente des mutations divergentes, cela peut vouloir dire qu’il n’est pas tout jeune.
Le virologue à l’Institut Pasteur revient. « Une possibilité, c’est que ce variant circule potentiellement à bas bruit depuis quelque temps, en Afrique ou ailleurs, dans des lieux où la surveillance des génomes est plus faible. », détaille Étienne Simon-Lorière. Précision importante, note le chercheur : il est possible qu’une partie de cette diversité soit liée à des erreurs humaines ou techniques lors du séquençage de ces virus. Tant que l’on ne voit pas ce variant B.1.640 s’imposer face au variant Delta, il n’y a pas spécialement à s’inquiéter. En France, où un cluster en Bretagne a été détecté ainsi que quelques cas sporadiques en Île-de-France et en PACA, Santé publique France n’est pas inquiète, car il n’y a pas de diffusion importante ou de progression. De plus, il n’est pas encore clair de l’impact de cette série de mutation sur le Sars-Cov2 sur sa transmissibilité ou sur une réduction partielle de l’efficacité des vaccins. « Des études sont en cours au Centre National de Référence, mais il faut pour cela des prélèvements de qualité pour isoler le variant et le tester en laboratoire. », explique Étienne Simon-Lorière.
Les autorités de santé vont également continuer à suivre l’évolution du nombre de génomes liés au variant B.1.640. Au Congo, le séquençage et le dépistage sont par contre trop limités pour que l’on sache réellement ce qu’il se passe. « Surtout que le variant Delta, dans certains pays d’Afrique, n’est pas encore dominant comme en France. », rappelle Étienne Simon-Lorière. Il est donc possible que d’autres variations du coronavirus circulent en sous-marin dans des pays avec peu de suivi épidémiologique. D’ailleurs, B.1.640 est intrigant aussi quand on cherche son plus proche « ancêtre commun ». « Il faut remonter loin, c’est très difficile de savoir d’où il vient. », déplore le chercheur. En clair, ce n’est pas un dérivé classique des grands variants connus, de Delta à Alpha en passant par Gamma et Beta. Et, que ce variant venu du Congo s’impose dans le monde ou non, c’est peut-être cela, le plus important. « On disait que Delta était devenu hégémonique et que le prochain variant serait l’un de ses descendants. Là, c’est une autre branche très différente, une lignée qui semble avoir vécu sa vie en dehors des radars. », rappelle Florence Débarre. « Cela nous rappelle que plusieurs versions du coronavirus circulent dans de nombreuses régions du monde où il y a très peu de surveillance génomique et où peu de doses de vaccin ont été reçues ».
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