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Tunisie : 94,6%, large choix du Oui au référendum constitutionnel

Photo : Le président tunisien, Kaïs Saïed, exprimant son vote, le lundi 25 juillet


Les tunisiens étaient appelés aux urnes, le lundi 25 juillet, pour choisir entre le Oui et le Non au projet constitutionnel sur la nouvelle Loi fondamentale soumis à leur regard à travers un référendum par le président du pays, Kaïs Saïed. Au soir de cette consultation politique, les tunisiens ont choisi « oui » en répondant favorablement à 94,6 %, au référendum sur la nouvelle constitution du pays, selon les résultats officiels préliminaires annoncés tardivement dans la nuit du mardi 26 juillet. Ce texte consacre la présidentialisation du pouvoir et tourne la page du parlementarisme instauré en 2014. Ce changement  fait craindre à l’opposition, comme aux analystes, une dangereuse régression démocratique. Si la légitimité d’un scrutin boudé par près de 70 % des tunisiens est mise en cause, le vote traduit un ras-le-bol généralisé vis-à-vis des élites politiques de l’ère post-révolutionnaire.

« Les tunisiens ont donné une leçon au monde (…). »

Kaïs Saïed

Dans la nuit de lundi à mardi, réagissant aux premières estimations, le président tunisien, Kaïs Saïed, a proclamé l’entrée du pays dans une « nouvelle phase ». La Tunisie s’est ainsi engagée sur la voie d’une Constitution renforçant nettement les prérogatives du locataire du Palais de Carthage. Dans un discours prononcé devant ses supporters rassemblés dans le centre de la capitale, le principal initiateur de la nouvelle Constitution voit dans la victoire du Oui, une leçon donnée par ses compatriotes. « Les tunisiens ont donné une leçon au monde, une leçon d’histoire. », a déclaré Kaïs Saïed, ajoutant que « le référendum va permettre de passer d’une situation de désespoir à une situation d’espoir ».

Tunisie polarisée sous Saïed

Pourtant, il faut le souligner, la Tunisie, confrontée à une crise économique, aggravée par le celle sanitaire mondiale liée à la pandémie de Coronavirus et l’invasion de la Russie en Ukraine (pays dont elle dépend pour ses importations de blé), est plus polarisée que jamais depuis que le président Kaïs Saïed, élu démocratiquement en 2019, s’est emparé des pleins pouvoirs le 25 juillet 2021. Une partie de la société civile juge la nouvelle constitution périlleuse pour la jeune démocratie tunisienne. Quant au premier citoyen de 64 ans, considère cette refonte de la Constitution comme le prolongement de la « correction de cap » engagée le 25 juillet 2021 quand, arguant des blocages politico-économiques, il avait limogé son Premier ministre et suspendu le Parlement avant de le dissoudre en mars dernier.

Absence de contre-pouvoirs

Avec la reprise en main ces derniers mois du Conseil supérieur de la magistrature ou de l’Instance Supérieure Indépendante pour les Élections (ISIE), les défenseurs des droits humains et l’opposition ont dénoncé l’absence de contre-pouvoirs et de garde-fous dans ce texte. Le 5 février dernier, Kaïs Saïed avait annoncé la dissolution du Conseil supérieur de la magistrature, une instance indépendante créée en 2016 pour nommer les juges, accusés de partialité et d’être sous l’influence d’Ennahda. Le 13 du même mois, il annonçait l’avoir remplacé par un autre organe « temporaire » et se donnait le pouvoir de limoger des juges et de leur interdire de faire grève. 

Résurgence autoritaire

En cause, si vous des espaces de liberté restent garantis, la question d’un retour à une dictature comme celle de Zine el-Abidine Ben Ali, déchu en 2011 lors d’une révolte populaire, pourrait se poser dans l’ « après-Kaïs Saïed ». « Ce n’est pas à cet âge que je vais commencer une carrière de dictateur. », se plaît souvent à ironiser le dirigeant sexagénaire, reprenant les propos de l’ancien président français, le Général Charles de Gaulle. Aux yeux de nombre d’acteurs politiques de la Tunisie, le vrai danger est indirectement incarné par Kaïs Saïed. La pérennisation (puisque gravée dans le marbre constitutionnel), de la présidentialisation du régime pourrait permettre au successeur de l’actuel président de faire glisser le pays vers un vrai régime autoritaire, voire dictatorial, comme à l’époque de Zine el-Abidine Ben Ali. Faut-il, dès lors, s’attendre à une « résurgence autoritaire », dans ce pays qui, en 2011, fut le berceau des « Printemps arabes » ? Demain réserve la réponse aux tunisiens qui se disent assister peut-être aujourd’hui à la naissance d’un nouveau dictateur.

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