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France : Plus de 2 tonnes de Cocaïne échouent sur les plages de la Manche

Photo : Illustration des gendarmes de l’unité canine « cynophile » patrouillent sur la plage de Neville sur Mer (LOU BENOIST / AFP)


Nouvelle « marée blanche » sur les côtes françaises. Emballées et contenues dans des sacs de sport, plus de deux tonnes de cocaïne, d’une valeur de près de 150 millions d’euros, se sont échouées entre le week-end dernier et le mercredi 1er mars sur le littoral de la Manche. Dimanche 26 février au matin, sur la plage de Réville, plusieurs sacs contenant environ 850 kg de cocaïne avaient été découverts. Et mercredi, des promeneurs sont tombés sur six nouveaux sacs à Vicq-sur-Mer. Cette fois, selon une source proche du dossier, il s’agit d’une tonne et demie de cocaïne, soit un total de 2,3 tonnes, ce qui est « historique ».

Voici comment ces ballots ont pu se retrouver sur le littoral normand et revenons sur les premières pistes suivies par les enquêteurs.

Un accident ou un rejet en mer volontaire ?

L’enquête, qui a été ouverte, lundi 27 février, par le parquet de Cherbourg, n’a pas encore pu déterminer comment ces ballots ont pu s’échouer. Les investigations ont d’abord été confiées à la section de recherche de Caen, la gendarmerie maritime et l’Ofast, l’Office dédié à la lutte contre les trafics de stupéfiants situé à Nanterre, en France. Plusieurs pistes ont toutefois déjà été avancées par les gendarmes et d’autres sources proches du dossier. Première hypothèse : ces ballots ont été jetés volontairement à la mer pour éviter un contrôle. « C’est ce qu’on appelle de l’échouage dans l’urgence, par crainte de contrôle, ou quand des douaniers maritimes sont localisés en mer. », a précisé à ce propos, Manuela Dona, douanière et secrétaire générale de la CGT au Havre, à France 3.

« (…) Plus de 800 kg qui s’échouent sur la plage de Réville, ce n’est pas rien ! »

Manuela Dona

La seconde hypothèse penche pour un décrochage accidentel de ces sacs depuis un bateau. Parfois, les ballots sont en effet arrimés à la coque du navire, et non pas placés à l’intérieur, et peuvent se décrocher en fonction des conditions de navigation. Mais pour Manuela Dona, vu la quantité ramassée, cette piste accidentelle est peu probable. « La drogue a été jetée à la mer lors d’un contrôle inopiné d’un navire ou bien ça a été organisé. Plus de 800 kg qui s’échouent sur la plage de Réville, ce n’est pas rien ! », juge-t-elle.

Ces ballots ont-ils emprunté la « route de la cocaïne » ?

Pour en savoir plus, les enquêteurs doivent aussi essayer de retracer le parcours de ces sacs. La préfecture maritime de la Manche a affirmé qu’une « surveillance particulière des approches maritimes du secteur du nord-Cotentin était maintenue et assurée par des moyens aériens ». « De nouveaux survols ainsi que des patrouilles maritimes sont réalisés. », a-t-elle ajouté. Les investigations vont particulièrement se pencher sur la bien connue « route de la cocaïne » qui débute en Amérique latine, où l’essentiel de la poudre est fabriquée par trois grands pays producteurs : Colombie, Pérou, Bolivie. La drogue traverse ensuite l’Atlantique dans des conteneurs maritimes, dissimulée dans des cargaisons parfaitement légales au départ des ports d’Amérique du Sud : Santos au Brésil et Guayaquil en Équateur en tête.

162 tonnes saisies en 2022

Plus de la moitié (55%) de la poudre blanche saisie en 2022 en France avait quant à elle débuté son périple dans les Antilles et en Guyane, espace qui sert de zone de transit avant d’arriver dans l’Hexagone. D’autres cargaisons voyagent enfin par l’Afrique de l’Ouest avant de remonter vers l’Europe. Au bout de la « route », la marchandise débarque enfin dans les grands ports européens, tels Rotterdam et Anvers (162 tonnes saisies en 2022), Barcelone en Espagne, Le Havre en France (plus de 10 tonnes en 2021) ou par des itinéraires bis à Marseille ou Dunkerque. Le reste circule en avion dans les valises ou les intestins de voyageurs, des mules, comme les autorités le repèrent régulièrement à Cayenne, en Guyane, sur des vols à destination de Paris.

Des personnes cagoulées sur la plage

Sur le littoral normand, la drogue retrouvée en une quantité jugée « colossale » attire des personnes mal intentionnées, a indiqué un gendarme français. Un petit groupe de jeunes vêtus de survêtements noirs, les visages masqués, a notamment été aperçu, ce jeudi 2 mars, sur la plage de Néville-sur-Mer, qui n’a pas été fermée aux promeneurs. « On est là pour chercher les coquillages qui sont arrivés hier. », ironisait l’un d’eux. Lors d’un point de presse, vendredi, le procureur de République de Rennes, Philippe Astruc, a « lancé un avertissement » contre les risques encourus par les candidats au « narcotourisme ». « Le fait de ramasser et transporter ces produits constitue un délit passible de dix ans d’emprisonnement. », a rappelé le magistrat, ajoutant que « toute personne qui serait amenée à découvrir de nouveaux produits doit en informer immédiatement la gendarmerie locale sans toucher à ces produits ».

« (…) Nous savons d’expérience que lorsqu’elle arrive en Europe, cette cocaïne est généralement pure entre 80 et 90%, ce qui signifie que l’ingestion de ces produits tels qu’ils se présentent là est mortelle. »

Philippe Astruc

Au risque pénal s’ajoute un danger pour la santé. « À l’heure qu’il est, je n’ai pas le degré de pureté de cette cocaïne. Mais nous savons d’expérience que lorsqu’elle arrive en Europe, cette cocaïne est généralement pure entre 80 et 90%, ce qui signifie que l’ingestion de ces produits tels qu’ils se présentent là est mortelle. », a-t-il insisté. Lors d’une précédente « marée blanche » fin 2019 sur les plages d’une zone allant des Pyrénées-Atlantiques à la Bretagne, un jeune homme était mort après avoir consommé de la cocaïne retrouvée sur une plage. Depuis que les premiers ballots ont été retrouvés, les patrouilles de gendarmerie, certaines accompagnées de chiens, se succèdent, tandis qu’un hélicoptère de la marine nationale survole régulièrement la zone. « Un renfort de CRS a aussi été mis en place, ce vendredi 3 mars, pour assurer une surveillance du littoral et empêcher que certains individus, en mal de stupéfiants, ne se promènent sur l’estran au beau milieu de la nuit. », a indiqué le lieutenant-colonel Le Sausse. Il déclare également avoir sollicité « des réquisitions auprès du parquet de Cherbourg pour contrôler des personnes suspectes ».

Précédent record de 1,9 tonne de cocaïne au Havre

Ce n’est pas la première fois que de la cocaïne arrive sur le littoral français. Fin 2019, des ballots contenant au total 1,6 tonne de poudre blanche s’étaient déjà échoués sur les plages d’une zone allant de Saint-Jean-de-Luz, dans les Pyrénées-Atlantiques, à Camaret, bien plus au Nord du pays, dans le Finistère. Et plus récemment, fin mai 2022, des pains de cocaïne, pour un total d’environ 21 kg, avaient été trouvés sur une plage de Berck, dans le Pas-de-Calais. Mercredi, lors d’une conférence de presse consacrée au bilan 2022 de la lutte contre les trafics de stupéfiants, le ministre français des Comptes publics en charge des douanes, Gabriel Attal, avait de son côté annoncé une saisie « historique » de 1,9 tonne de cocaïne au port du Havre, le dimanche 19 février dernier, par les forces de l’ordre. « Il faut éviter que ce tsunami blanc atteigne nos côtes. », avait ajouté Gabriel Attal. Il convient de noter qu’en 2022, un total de 27,7 tonnes de cette drogue a été saisi, soit une hausse de 5% par rapport à l’année précédente.

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