Photo : L’entrée où s’est tenu le sommet de l’Union Africaine à Addis-Abeba, le dimanche 18 février 2024 et pour lequel était accrédité Antoine Galindo (Michele Spatari/AFP)
Antoine Galindo se serait-il intéressé de trop près à des questions de politique interne en Éthiopie ? C’est tout du moins ce dont le gouvernement éthiopien l’accuse, ce mercredi 28 février. C’est la première fois que celui-ci sort du silence à ce propos alors que le journaliste français est incarcéré depuis le jeudi 22 février, à Addis-Abeba, la capitale éthiopienne. Les autorités l’accusent aujourd’hui d’avoir outrepassé son accréditation de journaliste et collecté illégalement « des informations sur des questions politiques internes » à l’Éthiopie. Un juge a prolongé, ce samedi 2 mars, sa détention jusqu’à sa prochaine comparution le mardi 1er mai prochain. Journaliste de la lettre spécialisée Africa Intelligence, Antoine Galindo, 36 ans, était arrivé en Éthiopie, le mardi 13 février pour couvrir le Sommet de l’Union Africaine (UA) à Addis-Abeba, siège de l’organisation.
« Des activités en contradiction totale avec la raison de sa venue »
Antoine Galindo « avait reçu l’autorisation de couvrir le 37e Sommet de l’UA, ce qui lui a permis d’entrer en Éthiopie. », a expliqué la Secrétaire d’État à la Communication, Selamawit Kassa, lors d’un point de presse auquel l’AFP n’avait pas été invitée. « Mais sous prétexte de journalisme, dès son arrivée à Addis-Abeba, il s’est livré à des activités en contradiction totale avec la raison de sa venue, notamment la collecte d’informations en lien avec des questions politiques internes. », a-t-elle ajouté. Il s’est notamment « entretenu avec des responsables et membres de partis politiques » et « a rencontré de militants des réseaux sociaux et d’autres entités, dont il a obtenu des informations en lien avec les affaires politiques du pays, alors que le but de son voyage était la couverture du Sommet de l’UA. », a-t-elle fustigé.
« Grave atteinte à la liberté de la presse »
Autre travail que celui de la couverture médiatique de l’UA est illégal. « Tout étranger entrant en Éthiopie pour couvrir le Sommet de l’UA sait qu’il est illégal de travailler sur des sujets hors du motif de l’entrée dans le pays. », a souligné Selamawit Kassa. Africa Intelligence a dénoncé une « arrestation injustifiée » constituant « une grave atteinte à la liberté de la presse », assurant qu’Antoine Galindo, ancien correspondant en Éthiopie pour plusieurs médias internationaux de 2013 à 2017, « disposait d’un visa l’autorisant à exercer son activité de journaliste ». Selon une source proche du dossier, Antoine Galindo a été arrêté jeudi après-midi dans la capitale éthiopienne en compagnie d’un responsable du Front de Libération Oromo (OLF), parti d’opposition légalement enregistré, avec qui il avait rendez-vous. Lors de sa comparution, la police a indiqué le soupçonner de « conspirer en vue de créer le chaos ».
Une première
Après des décennies de répression, la liberté de la presse avait fait des progrès spectaculaires à l’arrivée au pouvoir en 2018 de l’actuel Premier ministre, Abiy Ahmed, qui avait fait libérer plusieurs journalistes et opposants. Mais la situation s’est à nouveau profondément dégradée depuis 2020 et le début de deux ans de guerre contre les autorités dissidentes de l’État régional du Tigré. Il faut dire que l’Éthiopie a incarcéré plusieurs journalistes nationaux et expulsé plusieurs journalistes étrangers depuis 2020, mais l’emprisonnement d’un journaliste étranger est une première depuis plus de trois ans.
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