Photo : Le citoyen béninois, Constant Sinzogan
La déclaration du président Patrice Talon affirmant que « cinq ans est trop court » continue de susciter de vives réactions. Ce dimanche 21 décembre, Constant Sinzogan, citoyen béninois, a livré sur Facebook une analyse critique et structurée du nouveau mandat présidentiel de sept ans, introduit par la Constitution promulguée, le mercredi 17 décembre. Une prise de parole largement commentée sur les réseaux sociaux.
Une véritable tribune citoyenne
Trois jours après la promulgation de la nouvelle Constitution béninoise instituant un mandat présidentiel de sept ans renouvelable une fois, le débat ne faiblit pas. Face à la presse, jeudi 18 décembre, le chef de l’État Patrice Talon avait justifié la réforme en estimant que « cinq ans est trop court » pour gouverner efficacement. Une affirmation qui n’a pas convaincu Constant Sinzogan, dont la publication, diffusée dimanche sur Facebook, s’apparente à une véritable tribune citoyenne contre le septennat.
« Cinq ans suffiraient à faire le job »
D’entrée de jeu, l’auteur reconnaît au président de la République le droit d’estimer qu’un quinquennat est insuffisant. Mais il conteste fermement la conclusion qui en découle. « Autant il peut juger de la courtesse du mandat de 5 ans, autant il ne peut pas établir que celui de 7 ans suffirait. », écrit Constant Sinzogan, soulignant que Patrice Talon n’a jamais exercé un mandat de sept ans et ne peut donc en garantir l’efficacité. Constant Sinzogan rappelle, à titre de preuve, une déclaration passée du chef de l’État. Lors de son investiture, Patrice Talon affirmait alors que « cinq ans suffiraient à faire le job ». Une conviction dont il se serait éloigné à l’épreuve du quinquennat.
Cameroun et Guinée équatoriale
Pour l’auteur, rien ne permet d’exclure que le même constat d’insuffisance ne se répète pas à l’issue d’un septennat. « C’est donc une aventure et non une panacée. », tranche Constant Sinzogan. Dans son raisonnement, le citoyen béninois convoque l’expérience africaine. Il cite notamment Paul Biya au Cameroun et Teodoro Obiang Nguema Mbasogo en Guinée-Équatoriale, deux chefs d’État parmi les plus anciens au pouvoir sur le continent, tous deux élus sur la base de mandats de sept ans. Selon lui, la longévité de ces dirigeants démontre que la durée du mandat n’est pas en soi un gage de réussite politique ou de développement.
Une « tâche de Sisyphe »
Plus fondamentalement, Constant Sinzogan remet en cause l’idée même qu’une durée de mandat, quelle qu’elle soit, puisse suffire à « achever » la gouvernance d’un pays. Il compare l’exercice du pouvoir à une « tâche de Sisyphe », perpétuelle et sans fin, estimant que la République doit fonctionner comme « une course de relais » et non comme une course de fond. À ses yeux, l’efficacité réside dans la continuité institutionnelle, illustrée par des projets d’infrastructures menés sur plusieurs mandats successifs, comme la Route des Pêches ou l’échangeur de Vêdoko.
« Dieu seul sait combien on est efficace en situation de deadline. »
Constant Sinzogan
L’un des arguments centraux de sa publication repérée par la rédaction differenceinfobenin.com et celle du journal quotidien « Différence Info » du Groupe de presse « DIFFÉRENCE », ici à Porto-Novo, porte sur le risque de relâchement induit par un mandat long. Disposer de beaucoup de temps, selon lui, favorise la procrastination et affaiblit le sens de l’urgence. « Dieu seul sait combien on est efficace en situation de deadline. », écrit Constant Sinzogan, allant jusqu’à user d’une métaphore populaire pour souligner qu’un temps court, mais dynamique serait préférable à un temps long et improductif. Sur le plan politique, Constant Sinzogan se montre tout aussi sévère.
« L’engorgement démocratique »
Il estime qu’un dirigeant incapable de réussir un quinquennat ne réussira pas davantage un septennat. Il illustre son propos par une anecdote familiale devenue, selon lui, une leçon universelle : ce qui n’a pas été accompli de jour ne le sera pas davantage la nuit. Enfin, l’auteur met en garde contre ce qu’il appelle « l’engorgement démocratique ». L’allongement du mandat présidentiel, combiné à l’alignement et à l’allongement des autres mandats électifs, priverait les citoyens d’élections intermédiaires permettant de sanctionner ou de corriger l’action gouvernementale.
« Un étouffoir long de 14 ans »
Il évoque à ce titre les expériences de Jacques Chirac en France et de Macky Sall au Sénégal, qui avaient eux-mêmes renoncé au septennat au profit du quinquennat pour réduire l’usure du pouvoir. Pour Constant Sinzogan, le risque est clair : « un étouffoir long de 14 ans », durant lequel le peuple béninois serait privé de toute « bouffée d’oxygène démocratique ». Une conclusion sévère qui reflète l’inquiétude d’une partie de l’opinion face à une réforme constitutionnelle majeure, dont les effets politiques et institutionnels restent au cœur des discussions.



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