Photo : Les écoliers de l’École Urbaine Centre (EUC) de Porto-Novo de retour en classe, ce lundi 11 mai, à Porto-Novo
Depuis ce lundi 11 mai, les écoliers vivent le Coronavirus avec l’ouverture des classes et la reprise effective des cours officiellement effectuées par le ministre béninois des Enseignements Maternel et Primaire, Salimane Karimou, à l’École Urbaine Centre (EUC) de Porto-Novo, la capitale du Bénin. Mais les enfants sont un mystère aux multiples inconnus. Pour comprendre, il faut revenir sur ce que l’on croit savoir du lien entre enfants et Coronavirus. C’est bien ce que propose la rédaction differenceinfobenin.com du Groupe de presse DIFFÉRENCE à travers cet article. Depuis le début de l’épidémie, on a l’impression que les enfants semblent épargnés par le virus du Sars-Cov2. La plupart des données démographiques dans les pays touchés montrent que les plus jeunes sont sous-représentés, à la fois dans les personnes positives, les hospitalisations et les décès. Au 21 avril dernier, selon Santé Publique France, moins de 1% des personnes hospitalisées ont moins de 15 ans. Si cela est rassurant, il ne faut pas en déduire que les enfants sont obligatoirement peu concernés et que les écoles ne sont pas un possible lieu de contamination. D’abord, car les enfants étant a priori peu, voire asymptomatiques, il est logique qu’ils soient sous-représentés dans les hôpitaux. Quant aux dépistages, ici aussi, c’est tout à fait logique, car les tests PCR sont réalisés en majorité si une personne présente des symptômes. C’est justement ce que l’on voit sur le graphique de l’étude allemande évoqué dans notre précédente publication sur le sujet. Sur les 3712 tests positifs réalisés à Berlin, en Allemagne, l’un des pays qui a le plus dépisté, seuls 127 concernent des jeunes de moins de 20 ans.
L’arbre qui cache la forêt ?
Pour autant, certaines études plus globales tendent à montrer que les enfants sont vraiment moins représentés dans l’épidémie. En France, pays en déconfinement comme le Bénin, dans l’une des premières études sérologiques, visant à vérifier la part de la population infectée, seuls 2,7% des moins de 15 ans étaient positifs et ont donc été infectés au cours de l’épidémie. Mais le nombre de cas testés, notamment chez les plus jeunes, est faible. En Islande, une partie de la population a été testée même sans symptômes. L’étude montre que les enfants de moins de 10 ans ont moins de chance d’être infectés que les adultes. Une autre étude, publiée mercredi 29 avril dernier, affirme qu’en Chine, berceau du virus meurtrier, durant l’épidémie de Coronavirus, les enfants de moins de 14 ans auraient trois fois moins de risque d’être infectés que les adultes. Des résultats qui contrastent avec l’étude réalisée à Shenzhen, en Chine, notent les auteurs et qui apportent « un contrepoint » à l’analyse des résultats allemands, concède sur Twitter, le virologue Christian Drosten. Mais des études de ce type peuvent être biaisées, notamment pour deux raisons, rappellent les auteurs allemands :
- L’épidémie se répand en premier lieu via des voyageurs adultes.
- Les crèches et les écoles ont été fermées relativement tôt.
Ces deux éléments impliquent que les enfants sont moins susceptibles d’être les premiers cas de Coronavirus au sein d’un foyer. À l’inverse, deux données semblent indiquer qu’un enfant a autant de chance d’être contaminé qu’un adulte dans un foyer contaminé par le virus. Ainsi, dans l’étude française, les auteurs expliquent que si le virus est introduit dans un foyer, les parents ont 11,4% de risque d’attraper le Coronavirus, contre 10,2% pour les fratries. Une autre étude réalisée en Chine, à Shenzhen, a trouvé des résultats similaires. « Les enfants ont un risque d’infection similaire à celui de la population générale, mais ont moins de chance d’avoir des symptômes sévères », concluent les auteurs.
Contagieux ou pas ?
En résumé, les données sont tout sauf claires. Certes, les enfants semblent sous-représentés dans cette épidémie, mais cela pourrait être un biais et le risque de contracter le Coronavirus pourrait être similaire à celui des adultes. De plus, quand ils sont testés positifs, leur charge virale semble similaire. Mais cela veut-il dire qu’ils sont également contagieux ? Ce n’est pas une certitude. En effet, on pourrait estimer que moins on a de symptômes, moins on est contagieux. Les chercheurs allemands le concèdent. Ils n’ont pas classé leurs résultats en fonction des symptômes. Mais ils rappellent qu’une analyse poussée de 80% de la population d’un village italien a montré, dans une étude publiée récemment, que les asymptomatiques (40% des cas détectés) avaient autant de charges virales que les cas symptomatiques. Autre élément à prendre en compte. Est-ce que même si l’on est théoriquement aussi contagieux, cela veut-il dire que l’on va autant contaminer ? Les auteurs allemands rappellent qu’il serait logique de se dire qu’un enfant asymptomatique va moins tousser qu’une personne symptomatique, et donc moins expulser de virus. Aussi, les enfants soufflent moins d’air que les adultes, donc possiblement moins de virus. « Toutefois, d’autres arguments plaident en faveur de la transmission, tels que l’activité physique accrue et l’engagement social plus étroit des enfants à l’école. », pondèrent-ils.
Des éclaircissements après 11 mai ?
En clair, il est actuellement impossible de savoir avec certitude si les enfants sont véritablement moins contagieux que les parents et, si oui, à quel point. D’où la mise en garde des auteurs contre « une réouverture sans limites » des écoles. Est-ce que la circulation du virus chez les enfants lors de la première vague épidémique a été évaluée rétrospectivement ? À Paris, des travaux de ce type sont déjà en cours. Une équipe française a lancé une étude ciblant 600 enfants en Île-de-France pour vérifier notamment les cas asymptomatiques et la charge virale. Les résultats devraient être publiés quelques jours avant le début du déconfinement français, le 11 mai. Et du côté de Porto-Novo, qu’est-ce qui se fait dans ce sens ? En attendant, les politiques, mais aussi les scientifiques sont divisés sur la question. Il urge de relever que tous ces éléments nous montrent que les recommandations scientifiques évoluent, car notre connaissance de ce virus encore inconnu il y a six mois change sans cesse. Et nous ne saurons que plus tard si les choix pris aujourd’hui étaient les plus pertinents dans la lutte contre cette épidémie.
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